Devenir lecteur-correcteur, épisode 5 : se reconvertir pour devenir correcteur
Derrière l’envie de devenir correcteur, il y a souvent une passion pour les mots. Sèverine Mazières est tombée dedans quand elle était petite. Au gré de sa formation et des occasions qu’elle a pu saisir au cours de sa carrière, elle va doucement bifurquer vers la correction, gardant son amour d’enfance en toile de fond : celui de créer des histoires.
1. Présentez-vous.
J’ai 45 ans, j’habite à Périgueux (Dordogne-Périgord), en Nouvelle-Aquitaine (sud-ouest).
2. Comment êtes-vous devenue correctrice ?
J’ai été professeure de français et de cinéma pendant 15 ans après une classe prépa et des études de lettres. J’ai toujours aimé lire, écrire, apprendre. Je suis aussi autrice en parallèle. J’écris depuis que je sais écrire.
En 2010, je me lance dans la formation d’écrivain public avec un organisme de formation à distance et je découvre les métiers de biographe, puis de transcriptrice. Je quitte l’Éducation nationale et me lance à mon compte en 2013. Je suis alors contactée par la fille d’une ancienne collègue professeure. Elle cherche des transcripteurs indépendants, qui savent taper vite, sans faire de fautes (ou pas trop) pour son cabinet. Elle passe six mois à me donner des missions tout en me formant, en interne. Elle a un cabinet de sténotypie et j’apprends le sous-titrage en direct.
Avec elle, j’ai travaillé pendant six ans pour de grands groupes, des tribunaux (à la CPI de La Haye notamment), des banques, des fédérations… Je devais corriger, en temps réel, la frappe phonétique pour que les sous-titres soient lisibles et quasi instantanés, sur grand écran. Tout le monde se souvient des discours du Président retranscrits à la télé pendant la Covid. Ce n’était pas moi aux commandes : notre équipe faisait moins de fautes !
J’ai eu pas mal de demandes pour corriger des contenus de sites Internet (j’ai fait deux formations à la rédaction web et je maîtrisais les codes du SEO), puis des articles de magazines (Voici, Gala, Capital…), et finalement des livres (romans autoédités ou en maisons d’édition locales).
Malgré ces six années, j’avais du mal à me sentir légitime et j’avais peur de ne pas rendre un travail impeccable, n’ayant pas un vrai diplôme reconnu. Je cherchais « un truc » qui efface mon syndrome de l’imposteur. J’ai passé le certificat Voltaire deux fois, mais il est obsolète au bout de quatre ans. Tant pis ! J’ai alors tenté la formation de l’EFLC. Lors de mon entretien en visio avec François Lechat, il me dit que la formation ne semble pas vraiment adaptée, que je connais sans doute déjà tout ce qu’il y a dans la formation (ou presque — on ne connaît jamais tout), et il me propose de devenir correctrice de copies pour l’EFLC, car mon expérience de la transcription et du sous-titrage l’intéresse.
Me voilà désormais correctrice, toujours sans diplôme, mais plus confiante.
3. Qu’est-ce qui vous a attirée dans ce métier de lecteur-correcteur, le travail autour des mots ?
Je sais lire depuis la fin de la maternelle. J’écris des histoires depuis le CP. Je suis passionnée par les mots, leur origine (j’ai fait un peu de latin et de grec, je suis bilingue occitan), leur sens, leur évolution. Je ne pourrais pas me passer de la lecture et de l’écriture, et les collègues de l’EFLC m’apportent vraiment beaucoup. Nous avons des discussions passionnantes sur des virgules ! Si, si ! C’est possible ! J’adore chercher la petite bête, faire des jeux de mots, triturer les phrases, jouer avec le rythme. On a la chance d’avoir une langue extrêmement riche (et monstrueusement complexe !).
4. Comment exercez-vous ce métier de correctrice ? À plein temps ? Avez-vous une activité complémentaire ?
Je suis à mon compte depuis plus de 12 ans, en microentreprise, à 75 % (mes trois enfants occupent laaaargement le quart restant !).
Je ne fais pas que de la correction, j’ajoute un peu de rédaction (web et publirédactionnel). J’écris également des biographies pour des particuliers, des romans (publiés en maison d’édition) et des nouvelles (autoéditées). La partie « autrice » prend de plus en plus de place dans ma vie et ce n’est pas pour me déplaire. J’ai abandonné la rédaction et je suis en passe d’abandonner la transcription.
5. Quelles sont, selon vous, les qualités qu’il faut avoir pour devenir correcteur indépendant ?
Il faut être un correcteur irréprochable : respect des délais, qualité professionnelle du travail, minutie, rigueur… Mais ceci n’est que la partie émergée de l’iceberg. Il faut aussi être un entrepreneur, savoir faire sa com pour se faire connaître, se démarquer, savoir présenter ses services. On a beau être le meilleur correcteur du monde, si personne ne le sait, ça ne sert à rien ! Et si tout le monde sait qu’on est le meilleur correcteur, il ne faut pas décevoir ensuite… C’est un tout !
6. Quels sont vos domaines de prédilection, vos sujets favoris ?
J’aime faire connaître mon département (la Dordogne), ses artistes et artisans, les savoir-faire, les lieux touristiques, la gastronomie… Alors je démarche surtout une clientèle locale.
7. Qui sont vos commanditaires ?
Je corrige pour de petites maisons d’édition locales, des auteurs autoédités, des magazines locaux. Internet permet de travailler dans le monde entier, et c’est formidable ! Néanmoins, j’aime rencontrer mes clients, prendre un café avec eux et parler de leur travail. J’aime le contact humain, alors je privilégie souvent le local. C’est aussi ce qui me différencie des autres correcteurs : je teste, je consomme, je visite… ce que je corrige !
8. Y a-t-il un monde entre l’idée que vous aviez du métier de correcteur et la réalité ?
Je n’en avais pas d’idée avant de l’exercer ! On me l’a proposé un peu par hasard, j’ai été formée gracieusement tout en étant payée pour l’être, alors c’était un super challenge à relever pour moi !
9. Quel conseil donneriez-vous à ceux ou celles qui veulent devenir correcteur ?
Osez !
10. Que souhaitez-vous ajouter à l’adresse de tous les futurs correcteurs qui vous lisent ?
Donnez-vous à fond. Il y a des passages à vide, mais aussi de super rencontres à faire. Nos clients et prestataires sont également des professionnels de leur domaine et on a beaucoup à apprendre d’eux. Restez toujours respectueux face à eux et à leur travail. On ne peut jamais tout connaître ! Il faut parfois faire preuve de pédagogie et de souplesse, mais aussi de curiosité et d’ouverture d’esprit, et savoir se remettre en question.
Un grand merci, Sèverine (avec un « e » accent grave, s’il vous plaît) ! On peut avoir tendance à séparer le processus d’écriture du travail de correction, et pourtant l’un peut enrichir l’autre, et votre témoignage l’illustre parfaitement : être à la place de l’auteur vous permet de ne pas surcorriger et d’avoir la bonne posture en tant que correctrice, et avoir des connaissances en correction vous aide à produire des écrits de meilleure qualité.
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Vous êtes correcteur et avez envie de nous faire part de votre expérience ? N’hésitez pas à nous contacter à contact@eflc.fr : nous serons ravis de vous interviewer !
